mardi 10 novembre 2009

Eric Raoult ou celui qui fait toujours trop


Eric Raoult, député de Seine-Saint-Denis, a cru encore une fois faire assaut de subtilité et de finesse, en demandant par écrit au Ministre de la Culture ce "qu'il comptait faire" concernant les propos "inacceptables" que Marie NDiaye, notre prix Goncourt, a tenu au magazine les Inrocks.

Pour savoir de quoi il s'agit, suivez ce lien: http://bibliobs.nouvelobs.com/20091109/15794/eric-raoult-rappelle-marie-ndiaye-a-son-devoir-de-reserve

Eric Raoult, il fait un peu penser au fayot, dans une classe. Celui qui en fait des tonnes pour plaire au professeur et qui ne parvient pas à se faire aimer. Raoult, à chaque fois qu'il fait quelque chose, il est à côté de la plaque, c'est plus fort que lui.

Janvier 2009: les primaires au sein de l'UMP commencent pour désigner la tête de liste aux élections régionales 2010. Eric Raoult a été désigné porte-parole de campagne de Roger Karoutchi, l'ancien secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, et actuel président de l'opposition au sein du Conseil Régional d'Ile-de-France.

Le premier débat doit se tenir au Raincy, fief de notre député-fayot.

A l'UMP, le mot d'ordre est clair: on n'est pas le PS, on peut désigner un candidat à une élection sans que ça devienne la foire d'empoigne. Il faut apparaître unis.
Pour les débats qui sont prévus (un par département au départ), pas question de se déplacer avec des cars de supporters de l'un ou l'autre candidat. On sortira les t-shirts et les banderoles plus tard, quand le candidat aura été désigné. En attendant, on vient écouter sagement ce que chacun a à proposer.

On ne sait pas ce que Raoult n'a pas compris dans le mot d'ordre. Toujours est-il qu'au Raincy, devant les journalistes, ont débarqué des dizaines de militants arborant les couleurs de Roger Karoutchi, manifestant bruyamment leur enthousiasme et surtout, leur réprobation à l'endroit de son adversaire. Pécresse s'est faite insulter par des militants UMP devant les caméras et ça, elle ne l'a toujours pas digéré.

Le Président de la République non plus, d'ailleurs, à qui des bruits de couloir attribuent des mots très durs à l'endroit d'Eric Raoult. "Passez-moi ce connard! aurait-il demandé à un de ses collaborateur le soir du débat, avant de souffler dans les bronches dudit connard par combiné interposé.

Juin 2009: Eric Raoult est nommé rapporteur de la commission d'enquête parlementaire sur le port de la burka. Tout le monde s'attend à un dérapage car le député n'est pas avare de bons mots. Il s'est d'ailleurs fait décerner le "Y'a bon award", récompense teintée d'humour noir qui couronne les propos et attitudes les plus racistes, "pour l'ensemble de son oeuvre". Non qu'il soit particulièrement xénophobe, mais il ne rate pas une occasion de faire parler de lui, et ce genre de sortie laisse plus de traces dans les médias qu'une position consensuelle.

Et pourtant, rien. Raoult travaille sur le port de la burka dans le plus grand silence. Que se passe-t-il? Songerait-il à se faire pardonner ses incartades du début d'année? Se voit-il encore ministrable? Il a souvent parlé de l'outre-mer ces derniers temps. "La Poissonnière" (le surnom de son épouse, qui est également sa collaboratrice, dans les couloirs de l'Assemblée Nationale) a-t-elle envie de parfaire son bronzage au soleil des Antilles?

Et hier, patatras. Eric Raoult, croyant défendre l'honneur bafoué du Président, s'indigne sur les propos d'un écrivain et demande en filigrane au Ministre de la Culture de la faire rentrer dans le rang.

Le problème, c'est que Marie NDiaye, jusqu'à preuve du contraire, n'a pas sa carte à l'UMP. Il a du la confondre avec Rama Yade. Que voulez-vous, ces jeunes femmes noires, elles se ressemblent toutes et il commence à en avoir beaucoup, ça ne va pas. Ce n'est pas Hortefeux qui le contredirait là-dessus, du reste.

Blague à part, ce fameux "devoir de réserve" qui devrait sous-tendre les propos médiatiques d'un lauréat du Goncourt n'existe pas. Ni en droit, fort heureusement, ni en fait. On se demande ce qu'aurait dit Raoult si Eric Zemmour avait eu le Goncourt (ça reste heureusement improbable) et qu'il s'était répandu en louanges et dithyrambes sur l'action du Président de la République à longueur de colonne dans le Fig'. Ce qu'il fait déjà, remarquez, mais il n'a pas eu de prix littéraire.

Aurait-il invoqué le devoir de réserve pour faire taire les traits de plume admiratifs et transpirants d'admiration du chantre de la Sarkozie? Lui aurait-il demandé de modérer ses transports au nom du devoir de réserve? C'est peu probable.

Eric Raoult a encore provoqué la consternation de tous, plus particulièrement dans son propre camp. L'UMP commence à se demander s'il n'est pas un transfuge socialiste, tant ses interventions ont furieusement tendance à embarrasser la droite. C'est une nouvelle pierre dans le jardin de l'Elysée, qui s'en serait bien passé, après l'affaire Jean Sarkozy, la fronde de Rama Yade et de Jean-Pierre Raffarin, soutenu par le sénateur-maire des Pavillons-sous-Bois (93), Philippe Dallier et les fuites sur les pressions exercées sur les Guignols de l'Info.

Philippe Dallier, d'ailleurs, fait l'objet d'un article de Marianne cette semaine, qui en fait un "héros qui défie le Président".

Eric Raoult a du être jaloux de son voisin. Lui aussi veut sa double page dans Marianne...Mais bon, pour l'Outre-Mer, il repassera...

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