dimanche 6 décembre 2009

Dimanche 6 décembre, jour de Saint-Nicolas



Le 6 décembre est un jour un peu particulier pour les Lorrains, et plus largement pour les habitants de la "Grande Région" (entre Rhin, Moselle, Sarre et Meuse, entre France, Allemagne, Belgique et Luxembourg). Saint Nicolas, que les Bataves appelèrent Santa Niklaus puis Santa Klaus, est l'ancêtre religieux de notre père Noël laïc et consumériste. Mais il n'est point question ici de discuter la portée sociétale et économique des fêtes de fin d'année.

Je saisis simplement cette occasion pour laisser libre cours à la nostalgie de mon enfance et de ma région, et souhaiter une joyeuse Saint Nicolas à tous ceux pour qui ce jour évoque l'odeur du pain d'épice, la saveur des papillotes fourrées au praliné et le défilé du vénérable évêque flanqué de son compère Fouettard.

Pour la petite histoire, Saint Nicolas, évêque de Myre, n'a jamais mis les pieds dans nos contrées rudes et continentales de son vivant. Il est né en Lycie, qui se trouve être dans l'actuelle Turquie, en bordure de Méditerranée, dans sa partie asiatique. Il a vécu entre 270 et 345 après JC. De sa vie réelle en tant qu'homme, et en tant qu'évêque, on ne sait pas grand chose. C'est son hagiographie qui est passée à la postérité.

En effet, le vénérable évêque aurait gagné ses galons de "saint patron des écoliers", à l'occasion d'une innocente balade à la campagne. Il vint à passer chez un boucher qui n'avait rien trouvé de mieux, sept ans plus tôt, que d'assassiner, de découper et de transformer en petit salé trois enfants qui s'étaient perdus, puis réfugiés dans son échoppe. Les raisons qui poussèrent un boucher de campagne au IVème siècle après JC à se livrer à ces sortes de loisirs pour le moins étonnants ne sont pas mentionnées dans la légende. Toujours est-il que Nicolas, pas dupe, demanda à ce que le boucher lui servît ce fameux salé, et pas un autre. Démasqué, le tâcheron s'enfuit et Nicolas, d'un coup de crosse magique, ressuscita les gosses.

Dans certaines traditions, le boucher fut puni pour l'éternité et condamné à accompagner Saint Nicolas dans ses visites annuelles aux petits enfants en prenant la forme du Père Fouettard, chargé de punir à coups de baguettes de noisetier les plus désobéissants.

Par contre, c'est après sa mort que Saint Nicolas met les pieds en Lorraine, ou plutôt le doigt.

A la fin du XIème siècle, un chevalier lorrain, Aubert de Varangéville, entreprit de voyager jusqu'à Bari, dans le sud de l'Italie, où les restes du saint venaient d'être transférés. La relique dans son entier était bien conservée et le pape avait expressément interdit qu'on l'approchât. En effet, le trafic des reliques avait pris un essor considérable à l'époque. Pour convaincre les nobles et les clercs venus pour l'occasion qu'il s'agissait bien des restes du vénéré évêque de Myre, il en exhibait seulement la "dextre bénissante". Une phalange, en somme.

Le chevalier de Varangéville ne fit rien d'autre que de soustraire le saint morceau à la garde du pape Urbain II, et de l'emporter séance tenante en Lorraine, où l'on entreprit l'érection d'une basilique pour le conserver et le faire adorer par les fidèles.

Néanmoins, bien mal acquis ne profitant jamais, il fallait que le saint montre que le vol de sa phalange était l'expression de sa volonté propre et non contrainte. C'est ainsi qu'en 1240, un autre chevalier lorrain, Cunon de Réchicourt, emprisonné dix ans plus tôt à Jérusalem lors de la 6ème croisade, se vit libéré miraculeusement après avoir prié l'intercession de Saint Nicolas. L'heureux homme, s'étant endormi dans sa cellule, se réveilla sur les marches de la basilique Saint Nicolas, en Lorraine. Ses chaines tombèrent pendant la messe qu'il fit célébrer séance tenante.

A la suite de cet épisode miraculeux, le culte de Saint Nicolas ne cessa de grandir en Lorraine. Car, de bien entendu, il ne pouvait s'agir d'autre chose que d'une marque d'estime du bienheureux évêque envers le brave peuple lorrain. Saint Nicolas, déjà saint patron des écoliers, et plus largement des enfants, devint le saint protecteur des Lorrains. Et continua à nous apporter, chaque année, ses délicieux pains d'épices à son effigie....

Dans ces deux légendes, on remarque que Nicolas prend toujours le temps de la réflexion avant d'agir: 7 ans pour ressusciter les mômes, 10 pour libérer le chevalier...Ce n'est pas forcément la caractéristique première de certains de ses illustres homonymes contemporains, mais je m'égare...

Ci-dessous, une jolie comptine de Saint Nicolas qui vous rappellera sans doutes quelques souvenirs

"Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Tant sont allés, tant sont venus
Que le soir se sont perdus
Ils sont allés chez le boucher
Boucher, voudrais-tu nous loger ?

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Ils n'étaient pas sitôt entrés
Que le boucher les a tués
Les a coupés en p'tits morceaux
Mis au saloir comme pourceaux

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Saint Nicolas au bout d'sept ans
Vint à passer dedans ce champ
Alla frapper chez le boucher
Boucher, voudrais-tu me loger ?

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Entrez, entrez Saint Nicolas
Il y a de la place, il n'en manque pas
Il n'était pas sitôt entré
Qu'il a demandé à souper

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Du p'tit salé, je veux avoir
Qu'il y a sept ans qu'est dans le saloir
Quand le boucher entendit ça
Hors de la porte il s'enfuya

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Boucher, boucher, ne t'enfuis pas
repens-toi, Dieu te pardonnera
Saint Nicolas alla s'assoir
Dessus le bord de ce saloir

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Petits enfants qui dormez là
Je suis le grand Saint Nicolas
Et le Saint étendant trois doigts
Les petits se lèvent tous les trois

Ils étaient trois petits enfants
Qui s'en allaient glaner aux champs
Le premier dit "j'ai bien dormi"
Le second dit "Et moi aussi"
Et le troisième répondit
"Je me croyais au Paradis"


En photo, le défilé de Saint Nicolas à Nancy en 2005.

1 commentaire:

  1. Souvenirs, souvenirs... Pas un mois de Décembre sans le grand St-Nicolas et son défilé, son feu d'artifice, et les chaussures laissées devant la porte d'entrée et destinées à recevoir des douceurs, avec une carotte et un morceau de sucre pour la mule.
    Point de croquemitaine ou de monstres sous le lit dans mon enfance, mais un Père Fouettard qui m'a terrifiée longtemps !
    Et j'en connais qui ont toujours en tête le goût du pain d'épices recouvert de glaçage avec l'image de l'évêque et qui, le mois de décembre venu, parcourraient tout Paname pour en trouver ! ;-)

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