mardi 1 décembre 2009

Le 93, les Roms et les bonnes paroles


S'il est une population dont vous prenez conscience de l'existence en arrivant en région parisienne, et plus particulièrement en Seine-Saint-Denis, ce sont les Roms. Ces populations de tradition nomade arrivent le plus souvent des Balkans. Dans des caravanes, des habitations de fortune, ils vivent dans des "camps roms", installés sur des terrains en friche.

Le camp rom qui me frappe le plus aujourd'hui est celui de Bobigny. Aux abords du pont de Bondy, les caravanes se sont multipliées au fil des mois, allant jusqu'à former un véritable bidonville. Car c'est bien de bidonville qu'il s'agit. Ces gens vivent dans une extrême pauvreté, sur des terrains peu ou pas aménagés, dans le froid, la saleté, l'humidité. A l'approche de l'hiver, s'y installent également des tentes. Au bord de la nationale 3, aux abords de la ligne de tram n°1, en surplomb des berges du canal de l'Ourcq, le bidonville grandit.

Est-il possible d'imaginer les conditions de vie dans ces caravanes? Quand, frileusement, rentrant chez moi le soir, je pousse la porte de mon appartement bien chauffé, je me jette sous la douche, je me fais un café, que puis-je savoir de la vie dans une caravane montée de bric et de broc, avec des vitres fendues, où les toilettes sont dans des algeco, où le linge "sèche" sur des fils à l'extérieur, en plein mois de novembre, où il n'y a ni eau courante ni électricité? Rien.

A Montreuil, également, des bidonvilles se créent et se défont au rythme des installations et des expulsions. Car il faut savoir qu'un bidonville "sauvage" pose un problème d'ordre public et de sécurité. Outre tous les problèmes qui se posent aux riverains (pas d'évacuation des déchets, nuisances sonores, etc...)et aux mairies (recensement des populations pour la scolarisation des enfants, accès aux soins), ça flambe rapidement, une caravane. En mai dernier, un petit garçon de sept ans est décédé dans l'incendie d'un entrepôt désaffecté de Bobigny où s'étaient installées une centaine de caravanes. Cependant, c'est toujours délicat, l'expulsion d'un camp rom,et ce pour plusieurs raisons.

D'une part, l'expulsion (et l'arasement) d'un camp ne fait que déplacer le problème. Il est impossible, compte-tenu des problèmes de logement que connaît le département, de reloger ces personnes, ni en accueil d'urgence, ni en logement social. Les Roms expulsés ne font donc que se balader d'un terrain dangereux à l'autre.

Pour l'exemple, à l'été 2008, le plus grand bidonville de France, situé en bordure du périphérique, à Saint-Ouen, a été rasé, laissant sur le carreau plus de 500 personnes. Sur les 633 personnes du camp, seule une centaine a en effet été relogée...

D'autre part, l'expulsion pose un problème politique criant quand on déloge un camp rom pour "cacher" la pauvreté et la misère de ces gens aux yeux du beau monde.

Le 11 mars dernier, Nicolas Sarkozy était en visite à Vaujours, ce qui s'est traduit par l'expulsion manu militari de quelques caravanes qui s'étaient installées à proximité du passage présidentiel, à Sevran, sur un terrain de RFF.

"Ouh le vilain président de droite qui ne veut pas voir la misère!" a-t-on entendu à l'époque...

La semaine dernière, à l'occasion du Salon du Livre Jeunesse de Montreuil, le camp rom qui se trouvait en face de l'entrée VIP de la manifestation a été balayé par les bulldozers. Ses occupants ont été "relogés" dans des tentes à quelques mètres de là, hors de la vue des visiteurs illustres, tels le député et président du Conseil Général PS de Seine-Saint-Denis, Claude Bartolone, le président PS de la région Il-de-France, Jean-Paul Huchon (Polochon pour les intimes, rapport à sa ressemblance physique avec l'inspecteur Derrick et à ses propriétés soporifiques) ou encore la sénatrice-maire de Montreuil, la Verte Dominique Voynet.

Ni la droite, ni la gauche ne détiennent encore la solution miracle d'un problème insoluble: la résorption de la grande pauvreté. Cependant, il serait de bon ton d'éviter de donner des leçons d'humanisme et de rester humble face à des situations qui mériteraient une prise en compte plutôt qu'une utilisation politique.

cf cet article: http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article12273

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